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7 décembre 2010 2 07 /12 /décembre /2010 10:20

C'était l'histoire de ma vie ou plutôt de la sienne. Elle avait toute juste seize ans et déjà s'ennuyait. Elle s'ennuyait comme une personne qui avait tout vu, tout vécu, tout vaincu, tout fait avec son cul. Elle s'ennuyait, c'était tout vu. Elle était jeune, plutôt bien belle et très foutue. Elle était riche, elle était sarcastique et cérébrale, probablement bien plus lucide que la plupart des gens ne le sont à l'avènement de leur existence. Elle s'ennuyait depuis un moment déjà. Ses seuls petits plaisirs étaient de faire tourner les hommes en bourrique mais, même ça, ça lui était passé. Faut dire qu'elle s'était rendue compte très tôt qu'avec son petit cul, elle pouvait rendre dingue des bonshommes à peine croisé furtivement. Ce pouvoir de séduction l'avait séduit elle-même quelques temps mais à faire tourner les têtes sans passion, on se rend vite à l'évidence de son propre ennui. L'ennui est quelque chose de terrible à partir du moment où l'on en a absolument conscience, lorsqu'on ne se cache plus derrière le divertissement ou les sentiments falsifiés par nos âmes corrompues. Y'a rien de plus consternant de se rendre compte, en toute lucidité, au milieu d'une soirée sociale, de la vacuité des rapports humains, basés sur un enchaînement de faits et situations pré-établis et sur la passivité complice de nos bas instincts primaires. A partir de ce moment précis, chaque geste, sourire, parole, regard des autres vous paraissent être un Algeco jaune, une cabane préfabriquée, un couloir d'hôpital qui sent l'éther, un bonjour de commercial. Une fadeur délicieusement amère vous envahit. Vous lévitez au dessus de la foule sans aucune vodka au compteur. Vous êtes au dessus du lot et cette sensation vous rend irrémédiablement triste. Triste de ne vous en être pas rendu compte plus tôt, et triste de comprendre qu'à partir de maintenant, vous ne trouverez votre bonheur et votre salut que dans les moments où vous serez livrés à vous-même. Cette fille qui ne me voyait pas, je l'aimais. Je l'aimais comme une soeur, comme une fée, comme un rayon de lumière, comme un ange gardien, comme un alter ego. Pourtant, elle ne m'avait rien dit, elle ne m'avait rien fait, je me demande même si elle m'avait regardé vraiment un jour tout au fond du coeur (parce que au fond des yeux, on s'en fout un peut. Le fond des yeux, c'est bon pour la queue, pas pour les aveux). Je suis tombé en amour pour elle parce qu'elle représentait pour moi la force sûre et la faiblesse absolue. Elle incarnait à elle seule la dichotomie du monde. C'était une métaphore de la cyclotimie de notre société. C'était un élastique qui pouvait s'étirer à l'infini pour revenir à son point initial. Je suis tombé très vite sous son charme malsain et c'est à partir de là que j'ai commencé à me faire très mal...

 

 

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